Dakar, 16 juin (SL-INFO) – Le 17 avril 2025, 54 soldats béninois ont été tués à la frontière du Niger et du Burkina Faso. Le porte-parole du Bénin, Wilfried Léandre Houngbédji, a réagi à ce drame, le plus meurtrier jamais enregistré dans le pays, en pointant du doigt la responsabilité des juntes de Ouagadougou et de Niamey, sans les nommer explicitement. Selon Cotonou, l’extension incontrôlée des groupes djihadistes, venus des pays voisins du Sahel, est à l’origine de cette tragédie.

Les trois pays de l’Alliance des États Sahéliens (AES) sont confrontés à une insécurité grandissante et peinent à contenir la menace islamiste, notamment celle du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (JNIM), dont l’arsenal inquiète les capitales de la zone. Les modes d’actions discutables des régimes de l’AES et leurs choix de partenaires, comme le groupe Wagner au détriment d’une coalition régionale, portent une lourde responsabilité dans cette situation.

Au Mali, le groupe Wagner se retire, alors que le pays subit des attaques quasi quotidiennes de groupes armés. L’appel aux miliciens russes avait été justifié par la junte de Bamako par une volonté de se séparer du partenaire français, jugé « impérialiste voire complice avec les irrédentistes Touaregs ». Le bilan des années de collaboration entre les Forces armées maliennes (FAMA) et Wagner est famélique. La violence s’est propagée dans tout le pays, et le régime, confiné à Bamako, a mis fin à toute forme de respiration démocratique. Assimi Goïta vient de s’octroyer un mandat de 5 ans, après avoir dissous les partis politiques.

L’efficacité du groupe paramilitaire Wagner a été fortement remise en question, face aux assauts du JNIM et de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) contre l’armée et les populations civiles. Le politologue Yoro Dia affirme depuis des années que « le Mali ne sera sauvé par aucune armée de mercenaires mais par sa propre armée commandée par un pouvoir civil élu démocratiquement ».

Le Burkina Faso et le Niger, également membres de l’AES, sont confrontés au même trouble sécuritaire. Les promesses de retour rapide à la stabilité et à la paix, faites par les juntes, ne se sont pas concrétisées. Au contraire, le chaos progresse et compromet des années d’efforts en matière de développement économique et de transition démocratique.

En 2024, selon l’Indice mondial du terrorisme, 40 % des attaques djihadistes dans le monde ont frappé les trois pays de l’AES. Forts de leurs succès, ces groupes se renforcent avec l’arsenal des armées en déroute et multiplient les assauts contre les populations civiles. Cette dynamique touche désormais des pays comme le Bénin, qui a vu le nombre de morts sur son sol doubler en un an (173 victimes). Le Togo est également touché, et les zones frontalières du Ghana, de la Côte d’Ivoire, de la Guinée, du Sénégal et de la Mauritanie subissent une pression croissante. Un récent rapport de Timbuktu Institute alerte sur le danger à la frontière Est du Sénégal, notamment vers Kidira et Bakel.

Face à cette menace, la réponse doit être collective. Or, les juntes de l’AES s’isolent, privilégient la surenchère verbale et s’entourent de partenaires contreproductifs tels que Wagner et l’Africa Corps, abandonnant ainsi la lutte réelle contre l’expansion terroriste. La meilleure réponse au terrorisme n’est pas le recours à des mercenaires, mais l’utilisation des mécanismes de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).

Chaque putsch militaire au Sahel a affaibli la coopération régionale, favorisant les groupes extrémistes. La chute de mécanismes comme le G5 Sahel et le départ précipité de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), orchestrés par les juntes de l’AES, ont fragilisé la lutte collective contre le terrorisme. La scission au sein de la CEDEAO et le repli diplomatique accentuent l’isolement et la fragilité économique et politique de ces pays.

Le choix de Wagner par les juntes, au détriment d’un partenariat régional, compromet la sécurité collective. Le terrorisme prospère, les frontières s’effondrent et le chaos s’étend. Privées de soutiens occidentaux, les juntes se sont tournées vers la Russie et ses mercenaires de Wagner et de l’Africa Corps. Ce choix est problématique, compte tenu du peu d’égard de ces groupes pour les droits humains. Le départ de Wagner du Mali pourrait s’expliquer par les difficultés financières de l’État malien à payer ses miliciens.

Les soldats des juntes de l’AES et leurs mercenaires russes, en reproduisant la brutalité de ceux qu’ils combattent, compromettent la stabilisation du Sahel. Les massacres de civils, notamment de Peuls, alimentent le recrutement des groupes djihadistes, comme le JNIM. Les terroristes trouvent de nouveaux partisans, souvent mus par la vengeance. Enfants, femmes et vieillards sont victimes de ces violences, ce qui facilite le recrutement des groupes terroristes.

Les mouvements extrémistes exploitent les tensions intercommunautaires. Les miliciens de Wagner, au lieu de rétablir la confiance, ont multiplié les exactions. En mars dernier, des images de massacres de civils peuls dans l’ouest du Burkina Faso ont circulé. Au Mali, des dizaines de corps ont été découverts près du camp militaire de Kwala, dans la nuit du 21 au 22 avril 2025, après des arrestations menées par l’armée et ses alliés russes. Les djihadistes profitent de ces crimes pour grossir leurs rangs. Le massacre de Solenzo au Burkina Faso (10 et 11 mars 2025) illustre cette spirale infernale. Selon « Sud Quotidien », chaque bavure nourrit le terrorisme et menace les pays de la région, comme le Bénin.

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