Dakar, 08 déc (SL-INFO) – Le nouveau projet de décret réorganisant la Primature, signé par le Président Bassirou Diomaye Faye et contresigné par le Premier ministre Ousmane Sonko, marque un changement institutionnel majeur : la Primature devient un véritable centre de commandement, estime Abdou Fouta Diakhoumpa, spécialiste en administration publique et formateur à l’École nationale d’administration (ENA). Interrogé par L’Observateur, l’expert émet de sérieuses réserves sur la rationalité de cette réorganisation, la jugeant coûteuse et axée sur la satisfaction d’un «homme avide de pouvoirs».

Ministères affaiblis

Diakhoumpa estime que ce décret ne réduit pas les prérogatives de la Présidence, mais affaiblit plutôt les ministères, créant au passage des charges budgétaires additionnelles en pleine période d’austérité. Il pointe la création d’un Secrétariat d’État regroupant des missions jusque-là assumées par plusieurs ministères ainsi que la multiplication de directions et de postes considérés comme superflus, tels qu’un directeur de cabinet adjoint ou des secrétaires généraux adjoints élevés à des rangs supérieurs pour bénéficier d’avantages financiers.

«Mini-gouvernement»

Pour l’expert, la structure proposée donne l’impression d’un «mini-gouvernement logé à la Primature», sans véritable logique administrative. Il regrette également l’absence de principes modernes de management public, comme la délégation ou la déconcentration. Parmi les innovations les plus inquiétantes, il cite la possibilité pour le Secrétaire général du gouvernement de présider ou coprésider des réunions interministérielles, voire de coordonner l’action des ministères- un pouvoir jugé inhabituel et mal encadré.

Risques de chevauchements

La nouvelle architecture pourrait selon lui créer des doublons avec les organes de contrôle existants, notamment en élargissant les compétences de l’Inspection technique, qui pourrait être amenée à contrôler des administrations hors du périmètre de la Primature, risquant de créer des chevauchements avec l’Inspection générale d’État (IGE). Diakhoumpa s’interroge également sur la nomination, par le Premier ministre, des conseillers techniques du Secrétaire général, ce qui réduit l’autonomie de ce dernier.

En définitive, l’interlocuteur du quotidien du Groupe futurs médias estime que cette réorganisation repose davantage sur une volonté de concentration du pouvoir que sur une rationalité administrative, rappelant que «qui trop embrasse, mal étreint».

By

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *