Dakar, 07 août (SL-INFO) – Je vous livre ma lecture des 4 projets de loi qui seront examinés par l’Assemblée nationale, à partir du lundi 18 août prochain :
LANCEURS D’ALERTE
C’est l’innovation de l’arsenal juridique de l’actuel pouvoir. A l’instar des pays qui attachent du prix à la TRANSPARENCE et à la bonne gouvernance, le Sénégal va donc se doter d’une Loi portant statut et protection des lanceurs d’alerte. On ne peut que s’en réjouir quand on sait les méfaits de la dissimulation dans l’utilisation des ressources publiques. Un bémol cependant : le projet de loi protège bien le lanceur d’alerte (droits) ; il le surprotège même mais le texte reste étonnamment muet sur les éventuels abus (délations, dénonciations calomnieuses…) Pourtant, là où il y a des droits, il doit aussi y avoir des devoirs.
On a finalement l’impression que le passé des dirigeants actuels a beaucoup impacté la rédaction du projet de loi. On se rappelle les dénonciations tous azimuts des responsables de Pastef en tant qu’opposants. La démarche a fait mouche au niveau des masses et qui a même secoué l’Etat. Mais force est de reconnaître que la casquette du lanceur d’alerte a été souvent confondue avec celle du délateur. C’est un fait que les vainqueurs de la Présidentielle de mars 2024 ont tendance depuis leur arrivée au pouvoir, à légiférer systématiquement et « systémiquement » sur la base de leur propre vécu.
Attention aux dérives et au retour de flamme !
ACCÈS A L’INFORMATION
Cette réforme était très attendue par les citoyens et autres usagers de l’administration. Les journalistes et techniciens de la communication, pour ne citer que ceux-là, en ont fait leur cheval de bataille depuis très longtemps. Le projet de loi sur l’accès à l’information aurait pu alors être une grande innovation à l’image de celui relatif aux lanceurs d’alerte. Malheureusement la lecture du texte donne un goût d’inachevé. Le gouvernement a mis tellement de limites à l’accès (garde-fous) que l’inaccès a l’information risque de devenir la règle.
Trop d’exceptions et de secrets à protéger à l’arrivée ! A titre illustratif, quelle utilité de reconnaître le droit à l’information du public si, parallèlement, la loi interdit de révéler « les délibérations du gouvernement et des autorités relevant du pouvoir exécutif » ? Que fait-on alors du communiqué hebdomadaire du Conseil des ministres ?
La finalité du projet de loi sur l’accès à l’information laisse un goût de cendre, rien que sur le cas précis du « secret des libérations du gouvernement… »
On y trouve de nombreuses autres incohérences. Vivement qu’il soit amendé dans le bon sens par les députés !
DÉCLARATION DE PATRIMOINE
Une bonne chose d’élargir le nombre des personnes assujetties à la DDP. Idem pour l’abaissement du montant plancher qui passe d’un milliard à 500 millions. Désormais, une fois la loi votée, tout gestionnaire d’au moins un demi-milliard de deniers publics est tenu de faire la DDP. Reste à espérer que l’organe compétent en la matière ne sera pas débordé par la quantité importante des déclarations de patrimoine. Cela pourrait être synonyme d’inefficacité. Qui trop embrasse mal étreint.
OFNAC :
L’acronyme ne change pas, précise le gouvernement. L’Office national de lutte contre la fraude et la corruption (OFNAC) va devenir… L’Office national de lutte contre la corruption (OFNAC). C’est ce qu’on appelle CHANGER POUR NE RIEN CHANGER.
A notre avis, de toutes les lois annoncées, c’est celle relative à l’OFNAC qui est la plus insatisfaisante : réduction de son champ de compétence (suppression de la fraude, de l’audit et de la garde à vue). En termes clairs, vous aurez beau perdre des dizaines voire des CENTAINES de milliards à cause de la fraude (Senelec par exemple), l’OFNAC ne lèvera pas le plus petit doigt. Or la fraude va souvent de pair avec la corruption.
Le projet texte du gouvernement a également manqué d’ambition pour l’Office national de lutte contre la corruption dans le domaine de la saisine. Au lieu de passer obligatoirement par le parquet en cas de nécessité de poursuites judiciaires, l’OFNAC new look aurait pu disposer du pouvoir se saisir directement un juge dans certains cas de flagrance et de gravité. Au Niger, la HACIA, équivalent de notre OFNAC, a cette compétence. On comprend le souci de ne pas enlever au procureur de la République sa prérogative de « maître de l’opportunité des poursuites’, mais on aurait dû également être plus ambitieux POUR l’OFNAC.
En résumé, cette réforme, plutôt réformette de l’OFNAC a tout l’air de régler ses comptes à son actuel président. C’est une secret de polichinelle que d’affirmer que l’ancien procureur de la République, Serigne Bassirou Guèye n’est pas bien vu par l’Etat-Pastef.
Le projet de texte du gouvernement a également manqué d’ambition pour l’Office national de lutte contre la corruption dans le domaine de la saisine. Au lieu de passer obligatoirement par le parquet en cas de nécessité de poursuites judiciaires, l’OFNAC new look aurait pu disposer du pouvoir de saisir directement un juge dans certains cas de flagrance et de gravité. Au Niger, la HACIA, équivalent de notre OFNAC, a cette compétence. On comprend le souci de ne pas enlever au procureur de la République sa prérogative de « maître de l’opportunité des poursuites’, mais on aurait dû également être plus ambitieux pour l’OFNAC.
En résumé, cette réforme, plutôt réformette de l’OFNAC a tout l’air de régler ses comptes à son actuel président. C’est un secret de polichinelle que d’affirmer que l’ancien procureur de la République, Serigne Bassirou Guèye n’est pas bien vu par l’Etat-Pastef.
En conclusion de notre lecture, les 4 projets de loi nous inspirent le commentaire suivant : PEUT MIEUX FAIRE. En plus, il faut le dire et le répéter : LÉGIFÉRER, C’EST BIEN MAIS APPLIQUER LA LOI, C’EST ENCORE MIEUX.
Au Sénégal, on n’a pas un problème de lois – on a légiféré sur presque tout – mais on n’applique presque rien du tout. Question de rigueur et de culture ? Peut être.
Mamoudou Ibra KANE
Leader Mouvement
Demain C’est Maintenant