Dakar, 5 juillet (SL-INFO) – Le 23 juillet 2025, en Conseil des ministres, le président Diomaye Faye a ordonné une accélération de la modernisation des marchés et infrastructures commerciales. Il a pointé un dysfonctionnement trop fréquent dans le paysage urbain et économique sénégalais : celui d’infrastructures flambant neuves mais toujours inutilisées, comme le marché de Tilène à Ziguinchor, resté fermé faute de coordination et de mise en service effective.

Le constat n’est pas nouveau, mais il devient de plus en plus difficile à ignorer. À travers le pays, des bâtiments modernes, des équipements de dernière génération ou des halls commerciaux parfaitement achevés restent inaccessibles au public, car non raccordés, non réceptionnés ou bloqués dans les méandres administratifs. Le paradoxe est saisissant : alors que les besoins en infrastructures commerciales sont criants, celles qui existent déjà s’enlisent dans des délais incompréhensibles.

Ce blocage technique et institutionnel pèse sur la vitalité des échanges locaux. Il entrave l’écoulement des produits, alourdit les circuits de distribution, renforce l’informel et affaiblit la compétitivité. À l’heure où le pays cherche à bâtir une économie plus productive, plus endogène, plus résiliente, cette inertie devient un véritable frein.

Car moderniser l’économie ne passe pas seulement par la construction d’ouvrages. Elle exige des usages, de la cohérence, de la continuité. C’est toute la chaîne — de la planification à la gestion, en passant par la maintenance et la gouvernance locale — qui doit être réinventée.

Dans le même temps, le commerce extérieur sénégalais, en forte croissance, reste structurellement déséquilibré. En 2024, les exportations ont atteint un niveau record de 3 909 milliards FCFA, grâce notamment au pétrole raffiné, à l’or, et à l’agroalimentaire. Mais le déficit commercial dépasse toujours les 3 200 milliards FCFA. Le taux de couverture des importations par les exportations plafonne à 54,6 %, révélant une vulnérabilité persistante.

La modernisation des infrastructures commerciales intérieures, si elle est bien pensée, peut devenir une réponse à ce déséquilibre. Car un pays qui maîtrise mieux sa logistique, son stockage, ses réseaux de distribution, est aussi un pays qui valorise mieux ses productions locales, qui réduit ses pertes post-récoltes, et qui améliore sa compétitivité à l’export.

Les projets structurants comme SAR 2 ou Gas to Power doivent s’accompagner de cette modernisation diffuse, ancrée dans les territoires, dans les marchés, dans les pratiques quotidiennes.

Ce que souligne l’affaire du marché de Tilène, c’est qu’il ne suffit pas de construire. Il faut penser l’usage. Il faut que les infrastructures ne soient pas seulement livrées, mais vécues. Pas seulement financées, mais fonctionnelles.

L’économie productive que le Sénégal cherche à bâtir ne pourra pas émerger sur des ruines neuves. Elle demandera une capacité à faire simple, à faire utile, à faire durable.

Seneweb

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