Dakar, 04 août (SL-INFO) – Le Plan de relance économique et social (PRES) du Sénégal, baptisé « Jubbanti Koom », vise à réduire le déficit budgétaire de 12 % du PIB en 2024 à 3 % d’ici 2027, tout en s’appuyant sur trois piliers : la souveraineté économique, la rationalisation de la dépense publique et l’équité sociale. Parmi les 37 mesures structurantes proposées, certaines, comme l’importation de véhicules jusqu’à 10 ans, suscitent des débats quant à leurs impacts environnementaux, sanitaires et socio-économiques. Le Pr Adams Tidjani, de l’Institut de Management et d’Économie (IMEM/ALPE), livre une analyse critique de cette mesurese.
L’une des mesures phares du PRES est l’autorisation d’importer des véhicules d’occasion jusqu’à 10 ans d’âge, contre 8 ans actuellement, dans le but de « rendre les voitures plus accessibles aux ménages, stimuler le marché de l’occasion et mieux répondre aux réalités économiques ». Cependant, le Pr Tidjani juge cette mesure « contre-productive » en raison de ses impacts environnementaux, sanitaires et économiques.
Dans le contexte des engagements climatiques du Sénégal, notamment dans le cadre des accords de Paris, Tidjani met en garde contre une « augmentation du nombre de véhicules en circulation », qui aggraverait les émissions de gaz à effet de serre (GES). Il souligne que « le transport est l’une des principales sources d’émission des gaz à effet de serre (GES) responsable du réchauffement climatique ». Les véhicules plus anciens, souvent moins conformes aux normes environnementales, émettent également des polluants comme les oxydes d’azote (NOx), le dioxyde de soufre (SO2), les composés organiques volatils (COV) et les particules fines (PM10 et PM2,5). Ces polluants, associés aux microplastiques issus des pneus, « se retrouvent dans nos assiettes et nos eaux de boisson », posant un risque environnemental majeur.
Impact sanitaire
Les conséquences sanitaires de cette mesure sont tout aussi préoccupantes. Tidjani note que les NOx sont « responsables des maladies respiratoires telles que l’asthme, les infections pulmonaires, et des maladies cardiovasculaires », tandis que le SO2 provoque « la toux, l’irritation de la gorge, l’asthme, la bronchite chronique ». Les COV, quant à eux, entraînent « des maux de tête, des étourdissements, des nausées, une fatigue, une irritation des yeux, du nez et de la gorge, ainsi que des difficultés respiratoires ». Ces impacts risquent d’alourdir le fardeau sur le système de santé sénégalais, déjà sous pression.
Impact socio-économique
Sur le plan économique, Tidjani estime qu’« une augmentation du parc automobile va entraîner une augmentation des embouteillages dont le coût sur notre économie se chiffre à 235 milliards » de FCFA, selon une étude de Réussir Business. Cette mesure pourrait également décourager les investissements dans une industrie automobile locale, car « en favorisant les importations, l’État du Sénégal plombe les potentiels investisseurs qui souhaiteraient fabriquer, monter et/ou produire des véhicules sur place ». Enfin, Tidjani conclut qu’« une évaluation montrera très facilement que le coût négatif de cette mesure (réchauffement climatique, coût de santé des populations pouvant aller jusqu’à la mort, pertes économiques du fait des embouteillages) sera de loin supérieur à sa rentabilité financière ».