Dakar, 26 juillet (SL-INFO) – Ce 24 juillet 2025, à Washington, un stylo a brièvement glissé sur le papier. Derrière ce geste, une bascule discrète mais décisive. En signant les Accords Artemis, le Sénégal fait son entrée officielle dans le concert des nations engagées pour l’exploration pacifique de l’espace. Plus qu’un symbole, c’est un signal. Celui d’un pays qui cherche à dépasser ses frontières visibles, à inscrire sa trajectoire dans un futur technologique qu’il refuse de laisser aux seules puissances historiques.
Les Accords Artemis, portés par la NASA et une coalition d’États, visent à encadrer l’exploitation spatiale, à promouvoir la coopération civile et à garantir un usage pacifique des ressources lunaires et orbitales. En les rejoignant, le Sénégal affirme non seulement un choix diplomatique, mais une vision? ; celle d’un espace non plus lointain, mais stratégique. Un espace qui oblige à penser différemment la souveraineté, la science, la sécurité et le développement durable.
Dans un contexte africain en recomposition, où les enjeux technologiques deviennent des instruments de puissance, ce positionnement spatial n’est pas anodin. Il s’inscrit dans un double mouvement. D’un côté, la montée en puissance des ambitions africaines en matière de science, d’ingénierie, de données satellitaires et d’observation climatique. De l’autre, le besoin pour les États du Sud global d’exister sur les nouveaux théâtres de la géopolitique, dont l’espace est devenu un pilier majeur, à l’égal du numérique ou de l’énergie.
Pour le Sénégal, l’intérêt est multiple. Le spatial, c’est d’abord un outil de développement?: observation terrestre pour l’agriculture de précision, gestion des ressources, prévention des risques climatiques, connectivité en zones reculées. C’est aussi un levier de formation, de recherche, d’innovation, capable de structurer une génération d’ingénieurs, de scientifiques et de techniciens autour d’objectifs collectifs. Enfin, c’est un moyen de projection?, faire entendre une voix africaine dans les grands débats sur la gouvernance spatiale, les ressources extraterrestres, ou la militarisation de l’orbite.
Mais cette ambition ne se décrète pas. Elle suppose des choix structurants : investir dans les sciences fondamentales, tisser des alliances techniques solides, bâtir une infrastructure de veille et de régulation, et surtout ancrer cette orientation dans un imaginaire collectif. Car le risque est réel de ne signer que pour suivre, de rallier un programme sans construire sa propre feuille de route.
Le défi est donc double. D’un côté, ne pas se contenter d’un rôle de figurant dans les arènes de la science mondiale. De l’autre, traduire cette diplomatie spatiale en bénéfices tangibles pour les citoyens. Entre Washington et Thiès, entre l’orbite basse et la terre ferme, l’équation reste ouverte ; comment faire de l’espace un bien commun, et non un luxe stratégique réservé aux autres.
L’Afrique entre dans l’ère spatiale. Le Sénégal y entre avec une plume. Il lui reste à écrire l’histoire.